Analyse de l'arrêt TF 5A_178/2024 (d)

Anaïs Hauser, Assistante - Doctorante à l'Université de Neuchâtel

Représentation de l’enfant devant le Tribunal fédéral dans le cadre de la procédure de séparation de ses parents

I. Objet de l’arrêt

A teneur de son arrêt 5A_178/2024 destiné à la publication, le Tribunal fédéral réaffirme l’absence de réglementation concernant la représentation de l’enfant en procédure fédérale et rappelle ainsi le sort de la personne désignée pour représenter l’enfant en procédure cantonale en cas de recours devant sa juridiction (consid. 1.2). Ce rappel est l’occasion pour nous d’effectuer un état des lieux de la représentation de l’enfant devant notre Haute Cour dans le cadre de la procédure de séparation de ses parents, après un bref rappel des règles applicables en instance cantonale.

A noter que l’arrêt rappelle également les principes de la maxime inquisitoire illimitée et le devoir du tribunal d’actualiser les faits afin de statuer sur les circonstances actuelles. Néanmoins, ces éléments étant peu sujets à débat, nous nous focaliserons sur la problématique de la représentation de l’enfant devant le Tribunal fédéral.

II. Résumé de l’arrêt

A. Les faits

A., né en 1964, et B. née en 1984, se sont mariés en 2009. De cette union sont issus deux enfants, C. (né en 2009) et D. (né en 2013). Les parties vivent séparées depuis longtemps. L’organisation de la vie séparée a été réglée par un jugement rendu le 8 décembre 2017.

B. a déposé une requête en divorce le 28 janvier 2019 auprès du tribunal de district de Zurich. Cette autorité a demandé au curateur des enfants de rendre un rapport, a entendu les enfants, et a désigné une représentante (E.) à ceux-ci, après l’échec d’une médiation. A la suite de la conclusion d’une convention partielle par les parties, le tribunal a approuvé cette dernière et prononcé le divorce en mai 2022. Il a attribué l’autorité parentale exclusive à B., mais confié le droit de déterminer le lieu de résidence conjointement aux parties, et ordonné une garde alternée.

Concernant l’autorité parentale et le domicile des enfants, A. a fait appel auprès de l’instance supérieure, laquelle a rejeté l’appel par décision du 22 novembre 2022. En revanche, son recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral a été partiellement admis (TF 5A_33/2023 du 20 décembre 2023, en partie publié dans l’ATF 150 III 97), en ce sens que le jugement de l’instance supérieure cantonale a été annulé s’agissant de l’autorité parentale, et l’affaire renvoyée devant cette instance afin qu’elle examine si l’attribution d’un pouvoir de décision exclusif à l’un des parents se justifie dans certains domaines, tout en maintenant l’autorité parentale conjointe.

A teneur de sa décision du 13 février 2024, l’instance cantonale supérieure a maintenu l’autorité parentale conjointe, tout en la limitant partiellement à l’égard du père, et a confié un pouvoir de décision à la mère dans les domaines des soins médicaux et thérapeutiques ainsi que de la formation scolaire et professionnelle des enfants.

En date du 12 mars 2024, A. a saisi à nouveau le Tribunal fédéral d’un recours en matière civile concernant l’autorité parentale. Par ailleurs, E. a demandé à être également désignée comme représentante des enfants dans la procédure devant le Tribunal fédéral et à être indemnisée de manière appropriée.

B. Le droit : la représentation de l’enfant devant le Tribunal fédéral (consid. 1.2)

La Loi sur le Tribunal fédéral ne prévoit pas de base légale concernant la désignation d’un·e représentant·e à l’enfant dans le cadre d’une procédure fédérale. Une telle désignation n’est néanmoins pas nécessaire dans la présente procédure, étant donné que la représentante désignée dans la procédure cantonale peut continuer à exercer sa fonction devant le Tribunal fédéral si cela est nécessaire et doit être indemnisée en conséquence.

C. Commentaire

Ce considérant règle de manière succincte la problématique de la représentation de l’enfant devant le Tribunal fédéral. Ce dernier se contente de rappeler les principes, principes qui n’ont d’ailleurs pas fait l’objet d’explications beaucoup plus détaillées à teneur des jurisprudences antérieures1.

1. La représentation de l’enfant dans la procédure de séparation en instance cantonale (rappel)

Dans le cadre d’une procédure matrimoniale impliquant ses parents, l’enfant n’a pas le statut de partie à la procédure en tant que telle, bien que ses intérêts soient directement concernés. L’enfant bénéficie néanmoins d’un statut procédural sui generis2. Le CPC prévoit à cet égard une représentation légale particulière. En effet, en instance cantonale, la représentation de l’enfant peut être ordonnée par le tribunal dans les affaires de droit de la famille ; un curateur ou une curatrice « expérimenté[·e] dans le domaine de l’assistance et en matière juridique » est alors désigné·e à ce dessein (art. 299 al. 1 CPC). Les compétences de la personne qui représente l’enfant sont décrites à l’art. 300 CPC. Cette dernière peut par exemple déposer des conclusions et recourir s’agissant de l’attribution de la garde (let. b).

Le CPC prévoit une liste de cas, non exhaustive, dans lesquels la nécessité d’une curatelle doit en particulier être examinée (art. 299 al. 2 CPC). Ces hypothèses n’impliquent pas l’institution automatique d’une curatelle, cette dernière étant ordonnée « si nécessaire ». En revanche, lorsque la demande de curatelle de représentation émane de l’enfant, le tribunal doit accéder à cette demande. En cas de rejet de la demande, par exemple si le tribunal considère que l’enfant ne dispose pas de la capacité de discernement nécessaire à l’exercice de ce droit strictement personnel, l’enfant peut recourir contre ce refus (art. 299 al. 3 CPC).

L’art. 299 CPC n’est applicable que devant le ou la juge matrimoniale. Si la procédure a lieu devant l’autorité de protection de l’enfant, par exemple lorsque des parents non mariés sont en désaccord sur l’attribution de l’autorité parentale, l’art. 314abis CC est applicable. Cet article se distingue quelque peu de l’art. 299 CPC, notamment car la possibilité pour l’enfant de requérir une telle curatelle de représentation n’est pas reprise dans son libellé. Selon le Tribunal fédéral, il n’y a pas ainsi pas d’obligation d’ordonner une représentation de l’enfant dans le champ d’application de l’art. 314abis CC lorsqu’un·e enfant capable de discernement demande à être représenté·e. Néanmoins, notamment dans un souci d’égalité de traitement entre enfants de parents mariés et enfants de parent non mariés, la demande de représentation formulée par l’enfant devant l’autorité de protection devrait être restrictivement refusée par cette dernière3. Indépendamment de cette représentation procédurale, l’enfant capable de discernement peut désigner un·e mandataire privé·e (représentation volontaire), étant donné qu’il ou elle exerce un droit strictement personnel au sens de l’art. 19c al. 1 CC4.

Dans le cadre d’une adoption, l’art. 268ater CC est applicable s’agissant de la représentation de l’enfant, qui peut être ordonnée si nécessaire ou sur demande de l’enfant. En matière d’enlèvement international d’enfant, le tribunal a en revanche l’obligation d’ordonner la représentation de l’enfant (art. 9 al. 3 LF-EEA).

2. La représentation de l’enfant dans les affaires de droit de la famille en instance fédérale

L’art. 299 CPC régissant la représentation de l’enfant devant le ou la juge matrimonial·e cantonal·e ne s’applique pas en instance fédérale (art. 1 CPC a contrario). Partant, une requête visant à désigner un·e curateur·trice à l’enfant sur la base de l’art. 299 CPC dans le cadre d’une procédure fédérale de recours n’est pas recevable. Concernant la LTF qui règle la procédure applicable devant le Tribunal fédéral, celle-ci ne prévoit pas de réglementation correspondante sur la représentation de l’enfant5.

Néanmoins, l’absence de base légale concernant la nomination d’un·e représentant·e à l’enfant devant notre Haute Cour ne signifie pas que l’enfant ne peut jamais être représenté·e devant cette instance dans le cadre d’un litige de droit de la famille. Le Tribunal fédéral explique à cet égard que la désignation d’un·e représentant·e n’est pas nécessaire dans le cadre d’un recours devant sa juridiction, étant donné que le ou la représentant·e déjà désigné·e dans le cadre de la procédure cantonale peut continuer – dans la mesure où cela est nécessaire – à exercer cette fonction devant l’instance fédérale. Une interprétation de l’art. 300 CPC, qui prévoit expressément que la possibilité d’interjeter recours fait partie des compétences inhérentes à la curatelle de représentation, plaide selon nous en faveur de l’approche du Tribunal fédéral.

La désignation par une juridiction cantonale n’a pas non plus à être confirmée par le Tribunal fédéral6, qui se contente d’admettre la représentation en citant dans le préambule l’enfant et la personne chargée de sa représentation, à qui la décision est ensuite notifiée7. Le ou la représentant·e agit alors dans l’intérêt de l’enfant, en toute indépendance vis-à-vis des autorités et du tribunal, et ce également dans la procédure de recours au Tribunal fédéral8.

S’agissant des compétences et de la formation de la personne désignée pour représenter l’enfant, l’art. 299 al. 1 CPC prévoit qu’elle doit être « expérimenté[e] dans le domaine de l’assistance et en matière juridique ». Néanmoins, il n’est pas exigé qu’elle soit titulaire du brevet d’avocate ; elle peut par exemple avoir une formation d’assistant·e social·e ou de psychologue et posséder les connaissances juridiques nécessaires à la représentation9. Le Tribunal fédéral estime d’ailleurs que « dès lors qu’il ne s’agit pas, du point de vue fonctionnel, en matière de représentation de l’enfant, d’une activité d’avocat, on peut partir du principe que le curateur de procédure-avocat représente l’exception »10. Cependant, l’art. 40 al. 1 LTF prévoit que la qualité pour agir comme mandataire devant le Tribunal fédéral appartient aux avocat·es autorisé·es à pratiquer la représentation en justice. Selon nous, cet article ne devrait pas permettre au Tribunal fédéral de refuser qu’un·e représentant·e déjà désigné·e en procédure cantonale continue à exercer sa fonction en instance fédérale, s’il ou elle n’est pas titulaire du brevet d’avocat·e. En effet, cet article qui concerne la représentation volontaire permet de garantir la qualité de la représentation, ce qui est en soi déjà assuré par les critères prévus à l’art. 299 al. 1 CPC11.

Concernant la rémunération, le Tribunal fédéral se contente d’indiquer dans l’arrêt 5A_178/2024 que la personne désignée en instance cantonale pour représenter l’enfant doit être indemnisée en conséquence. En l’espèce, les frais judiciaires, qui comprennent également les frais de la représentante de l’enfant, sont mis à la charge de l’intimée qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Celle-ci doit également indemniser le recourant des frais nécessaires causés par le litige conformément à l’art. 68 al. 1 et 2 LTF (consid. 6.2). Les frais judiciaires sont provisoirement pris en charge par la Caisse du Tribunal fédéral, l’intimée ayant requis l’assistance judiciaire qui lui a été accordée. De même, la représentante de l’enfant est indemnisée par la Caisse du Tribunal fédéral.

Lorsqu’aucun·e représentant·e n’a été désigné·e en instance cantonale, l’enfant ne peut donc pas bénéficier devant le Tribunal fédéral d’une représentation – telle que prévue par l’art. 299 CPC ou 314abis CC – dans le cadre de la procédure de séparation de ses parents. De la même manière, l’enfant capable de discernement n’a pas la possibilité de demander une représentation indépendante en instance fédérale, la LTF ne prévoyant pas une telle possibilité sur le modèle de l’art. 299 al. 3 CPC. Il convient alors de se demander si une autre forme de représentation est néanmoins possible et pertinente.

3. La représentation volontaire de l’enfant capable de discernement par un·e mandataire privé·e

L’enfant capable de discernement peut, dans l’exercice de ses droits strictement personnels, décider d’une représentation volontaire12. Le Tribunal fédéral estime néanmoins que, la représentation de l’enfant étant prévue par une réglementation spécifique (art. 314abis CC et 299 CPC), la représentation contractuelle – à la place ou en parallèle de la représentation légale de l’enfant – constitue un cas exceptionnel13. Formulant un autre argument en ce sens, notre Haute Cour a également considéré que la portée des problématiques de garde ou d’autorité parentale étant difficile à appréhender même pour les enfants plus âgé·es, l’enfant – en sa qualité de partie sui generis – ne peut le plus souvent pas faire appel à un·e représentant·e conventionnel·le14.

Par ailleurs, la représentation volontaire et la représentation sur le modèle de l’art. 299 CPC ne sont pas interchangeables étant donné qu’elles n’ont pas exactement les mêmes fonctions et statuts. Notamment, la problématique des frais de représentation n’est pas négligeable. Comme admis par notre Haute Cour dans l’arrêt étudié, si l’enfant bénéficie d’une curatelle de représentation sur la base de l’art. 299 CPC devant l’instance cantonale puis le Tribunal fédéral, les frais de représentation qui font partie des frais de la procédure seront en principe supportés par le parent qui succombe15. Il appartient au tribunal de déterminer l’indemnité due à la personne qui représente l’enfant. Dans un arrêt de 2015, notre Haute Cour avait souligné que l’enfant n’étant pas partie à la procédure, son ou sa représentant·e n’a pas le droit de lui réclamer le montant non couvert par l’indemnité fixée. La différence ne peut pas non plus être facturée aux parties, l’indemnité ne constituant pas une partie des dépens16.

En cas de représentation volontaire, la rémunération du ou de la mandataire privé·e n’est pas comprise dans les frais de procédure. L’enfant est donc censé·e indemniser son ou sa mandataire avec ses propres biens (art. 305 al. 2 CC)17. Même si l’enfant est au bénéfice de l’assistance judiciaire, un certain montant restera à sa charge, ce qui est peu souhaitable, d’autant plus dans une situation familiale conflictuelle où les parents sont susceptibles de refuser d’accompagner (financièrement) l’enfant dans sa démarche de représentation par un·e mandataire. L’assistance judiciaire peut également lui être refusée.

Par ailleurs, la fonction de la représentation de l’enfant dans le cadre de la séparation de ses parents n’est pas la même suivant qu’elle constitue une représentation volontaire ou qu’elle soit ordonnée sur la base de l’art. 299 CPC ou de l’art. 314abis CC. Concernant cette seconde hypothèse, le Tribunal fédéral a notamment estimé que l’enfant n’étant considéré·e comme partie que du point de vue formel et non du point de vue matériel, le curateur ou la curatrice désigné·e dans la procédure matrimoniale ne doit pas défendre en premier lieu le point de vue subjectif mais déterminer le bien objectif de l’enfant et contribuer à sa réalisation18. Il a néanmoins admis que la volonté de l’enfant devait être documentée par la personne qui le ou la représente et que cette personne a également une fonction de « traductrice » et d’intermédiaire entre le tribunal et l’enfant19. A contrario, un·e mandataire privé·e doit en principe se focaliser sur l’intérêt subjectif de la personne qui l’a mandaté·e.

Si le Tribunal fédéral déclare dans une jurisprudence clarifier la controverse entre bien objectif et intérêt subjectif de l’enfant (« Kindeswille » oder « Kindeswohl ») s’agissant du rôle du curateur ou de la curatrice de l’enfant au sens de l’art. 299 CPC20, cette répartition des fonctions entre représentation indépendante et représentation volontaire de l’enfant est néanmoins critiquée en doctrine21, notamment en raison de son manque de cohérence avec ce que prévoit la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant22. Exemple flagrant du débat que suscite la problématique, le Tribunal fédéral effectue en réalité un revirement de jurisprudence, lui qui avait précédemment considéré qu’un·e curateur·trice devait veiller à ce que les préoccupations de l’enfant ainsi qu’une évaluation de la situation du point de vue de l’enfant soient intégrées dans le procès, et que sa présentation des faits participait à la clarification de l’opinion subjective de l’enfant23.

Selon nous, le caractère hybride d’une représentation indépendante au sens de l’art. 299 CPC constitue sa principale plus-value et justifie son existence alors que d’autres formes de représentation sont déjà prévues, la représentation volontaire permettant à l’enfant capable de discernement de mandater un avocat ou une avocate afin de défendre ses intérêts subjectifs et la curatelle de représentation de l’art. 308 CC assurant la défense du bien objectif de l’enfant24. La singularité de la représentation indépendante de l’enfant en procédure et, partant, son utilité, amènent d’autant plus à se demander pourquoi une telle curatelle de représentation ne peut être ordonnée ou demandée devant le Tribunal fédéral.

Enfin, une représentation volontaire n’est possible que si l’enfant qui en fait la demande dispose de la capacité de discernement au sens de l’art. 16 CC. Ainsi, si l’enfant est incapable de discernement en raison notamment de son jeune âge, il ne peut pas demander une curatelle de représentation selon l’art. 299 al. 3 CPC en instance cantonale et n’est pas en mesure non plus de décider d’une représentation volontaire, et ce, à tous les stades de la procédure.

4. Discussion

Si l’enfant n’est plus totalement exclu·e de la procédure de séparation de ses parents – notamment grâce aux développements des droits de l’enfant sur le plan international, particulièrement concernant le droit de l’enfant d’exprimer son opinion et d’être entendu·e dans toute procédure judiciaire le ou la concernant (not. art. 12 CDE) – son statut procédural n’est pas celui d’une partie en tant que telle. L’une des garanties procédurales du droit d’être entendu·e de l’enfant prévue en droit suisse consiste en l’institution d’une représentation indépendante de l’enfant (art. 299 CPC, respectivement, art. 314abis CC). Cette mesure procédurale, bien que ne permettant pas de garantir une prise en compte parfaite des intérêts de l’enfant, constitue une représentation sui generis cohérente avec le statut de l’enfant dans la procédure de séparation de ses parents et apparaît comme un moyen supplémentaire d’assurer la défense des intérêts de l’enfant et de ses droits procéduraux. L’absence de disposition équivalente en procédure fédérale semble ainsi discutable.

Les instances cantonales bénéficient d’une marge d’appréciation pour ordonner ou non une curatelle de représentation à l’enfant (cf. art. 299 al. 1 CPC, « si nécessaire »), cette dernière n’étant pas obligatoire dans les procédures de droit de la famille, à l’inverse de ce qui prévaut en matière d’enlèvement international d’enfants. Ainsi, il peut être argumenté que le fait que personne n’ait été désigné en procédure cantonale pour représenter l’enfant signifie que cela n’était pas nécessaire en l’espèce, résolvant ainsi la question devant le Tribunal fédéral également. L’absence de nécessité devant les instances précédentes justifierait ainsi qu’aucune représentation ne puisse être ordonnée devant l’instance fédérale de recours.

Par ailleurs, le refus de l’instance cantonale d’instituer une curatelle à la suite de la requête de l’enfant, de l’autorité de protection ou des parents peut faire l’objet d’un recours, devant conduire à une suspension de la procédure concernant les intérêts des enfants25. Un recours doit également pouvoir intervenir en l’absence de décision rendue sur ce point par le tribunal26. A défaut de recours, une curatelle de représentation selon l’art. 299 CPC sera définitivement exclue dans l’affaire concernée.

En conclusion, les cas où une représentation de l’enfant s’avère pertinente devant le Tribunal fédéral et où la problématique n’a pas été traitée devant les instances précédentes constituent vraisemblablement l’exception, étant donné qu’au niveau cantonal le tribunal doit examiner la nécessité d’une représentation de l’enfant, à tout le moins dans les cas énumérés. A cet égard et conformément aux maximes inquisitoire et d’office, le tribunal devrait d’ailleurs examiner de façon systématique si une représentation s’avère nécessaire à la sauvegarde des intérêts de l’enfant.

Cela étant dit, la nécessité d’une représentation devant le Tribunal fédéral n’étant pas complétement exclue, la possibilité d’une représentation indépendante, cohérente avec le statut sui generis de l’enfant dans la procédure de séparation de ses parents et dont les frais ne seraient pas à la charge de l’enfant, contrairement à ceux d’une représentation conventionnelle, devrait être garantie de la même manière qu’en procédure cantonale afin d’assurer la prise en compte du bien de l’enfant à tous les stades de la procédure.

Le projet de recherche SNSF SINERGIA PROJECT (FamyCH) Family Custody Arrangements and Child Well-Being in Switzerland vise à étudier le bien de l’enfant dans le cadre des procédures de séparation, en s’appuyant sur les connaissances de la démographie sociale, de la psychologie, de l’architecture et du droit. En lien avec cette dernière discipline, la dimension procédurale du contentieux familial concernant les enfants sera notamment examinée, étant donné qu’elle constitue une partie intégrante de la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans le contexte de ce projet interdisciplinaire, nous espérons ainsi pouvoir amener des solutions constructives et pragmatiques à la problématique de la défense des intérêts de l’enfant dans les procédures de séparation.


  1. TF 5A_33/2023 du 20.12.2023, consid. 1.2.1, non publié dans : ATF 150 III 97 ; TF 5A_103/2018 et 5A_111/2018 du 06.11.2018, consid. 1.4 ; TF 5A_426/2017 du 16.02.2018, consid. 1 ; TF 5A_579/2016 du 06.02.2017, consid. 1.3 ; TF 5A_529/2014 du 18.02.2015, consid. 8.3 ; TF 5A_768/2011, du 23.02.2012, consid. 1.5.
  2. Notamment : ATF 142 III 153, consid. 5.2.2, JdT 2017 II 102, p. 210 s., et les références citées ; Zogg Samuel, Das Kind im familienrechtlichen Zivilprozess, in : FamPra.ch 2017, p. 435 ; Diggelmann Peter/Isler Martina, Vertretung und prozessuale Stellung des Kindes im Zivilprozess, in : RSJ 111/2015, p. 143.
  3. De cet avis : BK ZGB-Affolter-Fringeli/Vogel, N 22 ; CR-CC I-Meier, N 13, ad art. 314abis ; ZGB I-Breitschmid, N 5, ad art. 314a/314abis.
  4. Pradervand-Kernen Maryse, La position juridique de l’enfant dans la procédure civile, à l’aune de quelques questions particulières, in : FamPra.ch 2016, p. 355 ; CR-CC I-Meier, N 13, ad art. 314abis.
  5. TF 5A_103/2018 et 5A_111/2018 du 06.11.2018, consid. 1.4 ; TF 5A_579/2016 du 06.02.2017, consid. 1.3 ; TF 5A_529/2014 du 18.02.2015, consid. 8.3 ; TF 5A_768/2011, du 23.02.2012, consid. 1.5.
  6. Pradervand-Kernen (note 4), p. 356.
  7. Diggelmann/Isler (note 2), p. 143.
  8. TF 5A_529/2014 du 18.02.2015, consid. 8.3 ; TF 5P.84/2006 du 03.05.2006, consid. 3.4.
  9. ATF 142 III 153, consid. 5.3.4.1, JdT 2017 II 102, p. 217. FamKomm Scheidung-Schweighauser, Anh. ZPO, N 10, ad art. 299 ZGB ; PC CPC-Diestchy-Martenet, N 8, ad art. 299 ; Diggelmann/Isler (note 2), p. 144.
  10. ATF 142 III 153, consid. 5.3.4.1, JdT 2017 II 102, p. 216.
  11. Nous reprenons ici l’argumentation défendue par Diggelmann/Isler (note 2), p. 144 concernant l’art. 68 al. 2 CPC sur la représentation conventionnelle en justice et l’appliquons à la représentation au niveau fédéral.
  12. Déjà admis à teneur de l’ATF 120 Ia 369, consid. 1 a) : « Le mineur capable de discernement peut agir seul - ou par l'intermédiaire de son représentant de choix – s'agissant de droits relevant de sa personnalité ». Le cas portait sur le droit aux relations personnelles du père de l’enfant. Egalement : supra p. 3, concernant l’art. 314abis CC.
  13. TF 5A_232/2016 du 06.06.2016, consid. 4.
  14. ATF 142 III 153, consid. 5.2.4, JdT 2017 II 102, p. 214.
  15. Par ailleurs, en procédure cantonale, l’art. 95 al. 2 let. e CPC prévoit expressément que les frais judiciaires comprennent les frais de représentation de l’enfant (art. 299 et 300 CPC). A cet égard également : Diggelmann Peter/Isler Martina (note 2), p. 148.
  16. ATF 142 III 153, consid. 2.4, JdT 2017 II 102, p. 204.
  17. Diggelmann/Isler (note 2), p. 142. Néanmoins, dans la mesure de leurs facultés économiques, les parents devraient à tout le moins avancer ces frais en vertu de leur devoir d’entretien (art. 276 al. 2 CC). De cet avis : CR CC I-Meier, N 31, ad art. 314abis.
  18. ATF 142 III 153, consid. 5.2.2, JdT 2017 II 102, p. 210 s.
  19. Idem, consid. 5.2.3.1 et 5.2.3.2
  20. ATF 142 III 153, consid. 5.2.1 et 5.2.2, JdT 2017 II 102, p. 210 s.
  21. Notamment : Droz-Sauthier Gaëlle/Zermatten Jean, L’enfant sujet de droit et droits des parents : conflits choisis, in : RMA 2023, p. 294 ; Zogg (note 2), p. 570 ; Schweighauser Jonas, Nr. 32 Bundesgericht, II. zivilrechtliche Abteilung Entscheid vom 17. Dezember 2015 i.S. A. gegen Obergericht des Kantons Zürich, B., C. – 5A_52/2015, in : FamPra.ch 2016 p. 540 ss. Résumé de la controverse : BSK ZPO-Michel/Steck, N 17‑19, ad art. 299.
  22. RS 0.107, ci-après : « CDE ».
  23. TF 5P.84/2006 du 03.05.2006, consid. 3.4.
  24. BSK ZPO-Michel/Steck, N 19, ad art. 299.
  25. FamKomm Scheidung-Schweighauser, Anh. ZPO, N 55, ad art. 299 ZGB.
  26. BSK ZPO-Michel/Steck, N 41, ad art. 299.
Divorce

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Autorité parentale

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Destiné à la publication

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