TF 5A_623/2017 - ATF 144 III 298 (d) du 14 mai 2018

Divorce; procédure; art. 12 CEDH; 14 Cst.; 283 CPC

Principe de l’unité du jugement de divorce (art. 283 CPC). L’art. 283 al. 1 CPC prévoit que le tribunal règle également les effets du divorce dans la décision sur le divorce. Pour de justes motifs, les époux peuvent être renvoyés à faire trancher la liquidation de leur régime matrimonial dans une procédure séparée (art. 283 al. 2 CPC). Le partage de prétentions de prévoyance professionnelle peut également être renvoyé à une procédure séparée si des prétentions de prévoyance à l’étranger sont concernées et si une décision relative au partage de celles-ci peut être obtenue dans l’État en question (art. 283 al. 3 CPC) (consid. 5.1).

Interprétation de l’art. 283 CPC par la jurisprudence. Analyse de la genèse de l’art. 283 CPC et de l’évolution à travers le temps de la jurisprudence du Tribunal fédéral sur le principe de l’unité du jugement de divorce (consid. 5.2 et 5.3 ; 6 à 6.3.3).

Décision partielle sur le principe du divorce et pesée des intérêts. Sur la base de son analyse, le Tribunal fédéral retient que le principe de l’unité du jugement de divorce de l’art. 283 CPC ne s’oppose pas à une décision partielle sur le principe du divorce. Lorsque l’une des parties, in casu l’intimée, ne s’oppose pas au divorce, mais à la décision partielle sur le principe du divorce, il faut effectuer une pesée entre les intérêts des parties (consid. 6.4 et 7).

Intérêts de l’intimée. Le devoir de renseigner de l’art. 170 CC vaut, comme effet du mariage, au-delà de l’éventuelle entrée en force du divorce jusqu’à la fin de la procédure relative aux effets accessoires. En outre, le tribunal peut également ordonner des mesures provisionnelles après la dissolution du mariage, tant que la procédure relative aux effets accessoires du divorce n’est pas close (art. 276 al. 3 CPC). Le risque de voir diminuer la motivation à mener à bien la procédure relative aux effets accessoires de l’époux qui souhaite divorcer et se remarier, une fois qu’il a obtenu la décision partielle sur le principe du divorce, doit être traité au moyen d’une conduite du procès appropriée (art. 124 CPC). La liquidation du régime matrimonial (art. 120 al. 1 CC), réservée expressément par la loi (art. 283 al. 2 CPC), est indépendante du moment où le divorce est prononcé. Les prétentions de prévoyance professionnelle acquises durant le mariage et jusqu’à l’introduction de la procédure de divorce sont partagées entre les époux (art. 122 al. 1 CC). Une décision partielle sur le principe du divorce selon l’art. 114 CC n’a pas d’impact sur l’entretien après le divorce (art. 125 CC). Finalement, l’intimée ne parvient pas à démontrer qu’il y aurait un intérêt à régler simultanément le principe du divorce et les droits et devoirs des parents par rapport aux enfants (art. 133 al. 1 CC). L’autorité parentale est en principe conjointe et indépendante de l’état civil des parents (art. 296 al. 2 CC) et seul le bien de l’enfant peut commander de déroger à ce principe (art. 298 al. 1 CC) (consid. 7.1.1 à 7.1.3).

Intérêts du recourant et droit au remariage (art. 12 CEDH ; art. 14 Cst.). Le recourant demande une décision partielle sur le principe du divorce, car il souhaite se remarier. Selon la doctrine, le droit fondamental au mariage (art. 14 Cst. et 12 CEDH), qui comprend le droit au remariage, plaide en faveur d’une décision séparée sur le principe du divorce quand les faits sont clairs et que le litige sur les effets accessoires se prolonge fortement dans le temps. Cette opinion doit être suivie, car la procédure civile doit contribuer à la mise en œuvre du droit matériel et être interprétée de manière conforme au droit constitutionnel. Il n’est pas certain qu’une application stricte du principe de l’unité du jugement de divorce soit conforme à la CEDH (consid. 7.2.1).

Résultat de la pesée des intérêts. En l’espèce, le motif de divorce de l’art. 114 CC est donné et la procédure va sans doute se prolonger longtemps, si bien que le recourant sera certainement âgé de plus de 70 ans. Ainsi, son intérêt à obtenir une décision partielle sur le principe du divorce l’emporte sur l’intérêt contraire de l’intimée (consid. 7.2.2 à 7.3).

Divorce

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Procédure

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Publication prévue

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Analyse

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Analyse de l'arrêt TF 5A_623/2017 - ATF 144 III 298 (d)

François Bohnet

30 août 2018

Droit à un jugement partiel sur le principe du divorce