TF 5A_767/2011 (f) du 1 juin 2012

Divorce ; contribution d’entretien ; art. 125 CC

Droit à une contribution d’entretien après le divorce. Une contribution est due en vertu du principe de la solidarité découlant de l’art. 125 CC si le mariage a créé une position de confiance pour l’un des époux, qui ne saurait être déçue même en cas de divorce. La confiance placée par cet époux dans la continuité du mariage et dans le maintien de la répartition des rôles, convenue librement entre les époux durant le mariage, mérite objectivement d'être protégée et le crédirentier a par conséquent en principe un droit au maintien du niveau de vie des époux durant le mariage. Un mariage peut avoir une influence concrète sur la situation de l'époux crédirentier s'il a duré au moins dix ans jusqu'à la date de la séparation des époux ou si, indépendamment de sa durée, les époux ont eu des enfants communs (consid. 5.2.2).

Atteinte à la santé avant le mariage. Lorsqu’un des époux souffrait d’atteinte à sa santé déjà avant le mariage, il convient de considérer que l’autre époux a implicitement choisi et accepté d'assumer ce destin, ce qui fait naître chez l'époux atteint dans sa santé une confiance fondée et digne de protection dans le maintien de cette situation et en particulier dans le fait que son époux lui apporterait son soutien. Dans cette mesure, il doit être tenu compte de l'invalidité de l'intimée dans l'appréciation de l'influence concrète du mariage, malgré le fait que l'accident soit survenu antérieurement à sa célébration, d'autant plus que l'art. 125 al. 2 ch. 4 CC fait expressément mention de l'état de santé des époux dans les critères à prendre en considération. Le mariage doit ainsi être considéré comme ayant eu une influence concrète sur la situation de l'intimée, compte tenu non seulement de sa durée de neuf ans et demi et de la naissance d'un enfant commun, mais également de l'état de santé de l'intimée (consid. 5.3).

Montant de la contribution d’entretien. Pour fixer la contribution à l'entretien d'un conjoint dont la situation financière a été concrètement et durablement influencée par le mariage, l'art. 125 CC prescrit de procéder en trois étapes. La première étape consiste à déterminer l'entretien convenable, après avoir constaté le niveau de vie des époux pendant le mariage. Lorsque la situation financière des époux est favorable, il faut se fonder sur les dépenses indispensables au maintien des conditions de vie choisies d'un commun accord par les conjoints. Toutefois, lorsqu'il est établi que ceux-ci ne réalisaient pas d'économies durant le mariage ou qu'en raison des frais supplémentaires liés à l'existence de deux ménages séparés et des nouvelles charges, les revenus sont entièrement absorbés par l'entretien courant, il est admissible de s'écarter d'un calcul selon les dépenses effectives des époux durant la vie commune. Dans un tel cas, la méthode du minimum vital élargi avec répartition de l'excédent entre les époux permet de tenir compte adéquatement du niveau de vie antérieur et des restrictions à celui-ci qui peuvent être imposées au conjoint créancier et aux enfants (consid. 6.1).

Prise en compte des arriérés de contribution d’entretien dans le calcul du minimum vital. Les arriérés de contributions d'entretien ne doivent pas être pris en compte par le juge du divorce dans le calcul du minimum vital du débirentier, et ce même si une saisie de salaire est en cours pour leur recouvrement, car lorsque ces contributions ont été fixées, le juge a pris en considération le minimum vital du débiteur. Si celui-ci ne les a pas payées, il ne peut pas en obtenir la déduction sur une période ultérieure, au détriment de la créancière (consid. 6.2.1).

Durée de la contribution d’entretien. La règle selon laquelle on peut exiger d’un époux qu’il reprenne une activité à 100% lorsque le plus jeune des enfants a atteint l’âge de 16 ans révolus a clairement été pensée pour les situations dans lesquelles le parent gardien est en mesure de prendre ou reprendre une activité lucrative, ce qui n'est pas le cas lorsque l’époux concerné est au bénéfice d’une rente d’invalidité. Cela étant, la confiance que l’épouse a pu placer dans le mariage ne saurait être protégée indéfiniment, sans tenir compte de la durée du mariage. C’est pourquoi en l’espèce il se justifie de limiter la durée du versement de la contribution d’entretien (consid. 7.3).
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