TF 5A_327/2018 (f) du 17 janvier 2019
Divorce; entretien; mesures provisionnelles; revenu hypothétique; procédure; art. 285 al. 2 CC
Contribution de prise en charge (art. 285 al. 2 CC). La contribution d’entretien sert aussi à garantir la prise en charge de l’enfant par les parents et les tiers. Lorsque la prise en charge est assurée par l’un des parents (ou les deux), l’obligeant ainsi à réduire son activité professionnelle, la contribution de prise en charge doit permettre de garantir sa présence auprès de l’enfant. Si les parents exercent tous deux une activité lucrative sans toutefois se partager la prise en charge de l’enfant ou, au contraire, s’ils s’occupent tous deux de manière déterminante de l’enfant, le calcul de la contribution de prise en charge se fera sur la base du montant qui, selon les cas, manque à un parent pour couvrir ses propres frais de subsistance (consid. 5.2.1).
Méthode de calcul de la contribution de prise en charge (art. 285 al. 2 CC). La contribution d’entretien comprend désormais le coût lié à la prise en charge de l’enfant par le parent qui s’en occupe personnellement. La méthode dite des frais de subsistance a été considérée comme celle qui correspond le mieux au but du législateur pour déterminer les coûts indirects induits par la prise en charge de l’enfant. La détermination de ceux-ci s’effectue ainsi sur la base du montant qui, selon les cas, manque à un parent pour couvrir ses propres frais de subsistance (consid. 6.2).
Revenu hypothétique – rappel du principe (consid. 5.2.2).
Reprise d’une activité lucrative du parent gardien. On est désormais en droit d’attendre du parent gardien qu’il recommence à travailler en principe à 50% dès l’entrée de l’enfant à l’école obligatoire, et à 80% à partir du moment où celui-ci débute le degré secondaire. Dans les cas où les parents pratiquaient une répartition « classique » des rôles avant la dissolution du ménage commun, il pourra s’avérer plus adéquat de laisser le parent qui s’occupait principalement des enfants continuer de le faire pendant un certain temps, et inversement (principe de la continuité) ; mais le partage des tâches pratiqué avant la séparation ne saurait être perpétué indéfiniment. En tant que ligne directrice, ce modèle peut être assoupli dans des cas particuliers, en présence de motifs suffisants (consid. 5.2.3).
En l’espèce, l’intimée s’occupait des enfants de manière prépondérante, exerçant parallèlement une activité à taux réduit comme indépendante. Après la séparation, elle a trouvé un emploi salarié à 50%, qu’elle a dû quitter en raison de surmenage professionnel attesté par certificat médical, sans précision de durée. Il a été retenu qu’une augmentation de l’activité professionnelle à 70% pouvait être exigée dès que la plus jeune des filles aurait 13 ans. Ce taux d’occupation, légèrement inférieur à celui prévu par les lignes directrices, est justifié dès lors que la prise en charge des enfants incombe exclusivement à la mère (consid. 5.3.2.1 et 5.3.2.2).
Calcul de la contribution d’entretien de l’épouse (art. 125 CC). La Cour cantonale a réparti le disponible (sous déduction des contributions d’entretien aux enfants) à raison de 35% pour le mari et 65% pour son épouse, selon la méthode du minimum vital avec répartition de l’excédent, bien que les contributions en faveur des enfants aient été arrêtées de manière relativement large (méthode concrète). Cette répartition se justifiait, parce que l’épouse a la charge complète des enfants, et donc leur charge financière quand leur père devrait exercer son droit de visite, et parce que sa situation financière est moins confortable que celle du père (consid. 7.1 et 7.2.1).