TF 5A_643/2020 (f) du 11 septembre 2020
Mesures protectrices; étranger; DIP; enlèvement international; art. 1, 3, 5, 12, 13 CLaH80; 5 LF-EEA; 2, 152, 296 CPC et 8 CEDH
Champ d’application de la CLaH80 et conditions du retour de l’enfant (art. 1, 3, 5 et 13 CLaH80). La Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants a pour but d’assurer le retour immédiat des enfants déplacés ou retenus illicitement dans tout Etat contractant et de faire respecter les droits de garde et de visite existants dans un autre Etat contractant. La Convention s’applique à tout enfant de moins de 16 ans qui avait sa résidence habituelle dans un Etat contractant immédiatement avant l’atteinte aux droits de garde ou de visite. Le retour ne peut être ordonné que si le déplacement est illicite au sens de l’art. 3 CLaH80 et si aucune exception au retour n’est réalisée (art. 13 CLaH80). La Suisse et le Royaume-Uni ont ratifié la Convention (consid. 3.1, 3.2).
Détermination du droit applicable (art. 3 al. 1 let. a, 12 CLaH80 et 2 CPC). Comme les litiges relatifs à l’enlèvement international d’enfants sont, par essence, de nature internationale, le Tribunal fédéral doit vérifier d’office et avec un plein pouvoir d’examen le droit applicable. A défaut de réglementation dans la CLaH80 et dans la LDIP concernant le droit applicable dans l’Etat requis à la procédure en matière d’enlèvement international d’enfant, les autorités judiciaires suisses saisies appliquent le droit de procédure suisse (consid. 4.3).
Prise en compte de moyens de preuve illicite (art. 152 al. 2, 296 al. 1 CPC). Le tribunal ne prend en considération les moyens de preuve obtenus de manière illicite que si l’intérêt à la manifestation de la vérité est prépondérant. Contrairement à la preuve irrégulière, recueillie en violation d’une règle de procédure, la preuve illicite est obtenue en violation d’une norme de droit matériel. Elle n’est utilisable que d’une manière restrictive. L’autorité judiciaire doit procéder à une pesée de l’intérêt à la protection du bien lésé par l’obtention illicite et de l’intérêt à la manifestation de la vérité, ce dernier étant spécialement fort dans les affaires du droit des familles relatives aux enfants, soumises à la maxime inquisitoire illimitée (consid. 4.3.2).
Exceptions au retour (art. 13 al. 1 CLaH80, 5 LF-EEA). L’autorité judiciaire de l’Etat requis n’est pas tenue d’ordonner le retour de l’enfant lorsque le parent ravisseur établit que l’autre parent qui avait le soin de l’enfant n’exerçait pas effectivement le droit de garde à l’époque du déplacement. Le risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable est également un motif d’exception au retour, par exemple lorsque le placement auprès du parent requérant ou d’un tiers n’est pas dans l’intérêt de l’enfant. Le critère du retour intolérable dans le pays d’origine concerne l’enfant et non les parents (consid. 5.1, 5.1.2, 5.1.2.1 et 5.1.2.2). La situation économique du parent ravisseur en cas de retour avec l’enfant n’est pas déterminante. Le retour n’est pas ordonné dans un endroit précis du pays de provenance (consid. 5.3.2).
Exigences tirées de l’article 8 CEDH. En matière d’enlèvement international d’enfants, les obligations que l’art. 8 CEDH fait peser sur les Etats doivent notamment s’interpréter au regard de la CLaH80. Ceux-ci doivent ménager un juste équilibre entre les intérêts concurrents, dans les limites de leur marge d’appréciation, mais en tenant compte que l’intérêt supérieur de l’enfant doit constituer la considération déterminante (consid. 6.1).