TF 5A_46/2020 (f) du 17 novembre 2020
Divorce; procédure; art. 334 CPC; 18 CO
Voie de droit applicable à une décision de rejet de la requête d’interprétation d’un jugement qui homologue une convention de divorce (art. 334 CPC ; 18 CO). Une convention de divorce homologuée par un jugement est susceptible de faire l’objet d’une interprétation qui doit se baser sur le sens voulu par l’autorité (art. 334 CPC), et non sur les règles applicables à l’interprétation des contrats (art. 18 CO). La voie de droit contre une décision rejetant ou déclarant irrecevable la demande d’interprétation pourra ainsi être soit le recours, si on souhaite interpréter le jugement en se référant à la manière dont le tribunal a compris la volonté des parties, soit l’appel ou le recours si l’autorité interprète ou rectifie d’office la convention au sens de l’art. 334 CPC (consid. 4.2.2).
En l’espèce, la convention de divorce des parties a été ratifiée par un jugement de divorce. L’époux a déposé une requête d’interprétation du jugement de divorce, qui a été rejetée par décision du Tribunal civil de l’arrondissement de Lausanne, au motif que ledit jugement ne pouvait faire l’objet d’une demande d’interprétation au sens de l’art. 334 CPC, mais devait être interprétée selon l’art. 18 CO. Cette dernière décision indiquait l’appel comme voie de droit applicable. Un appel a été déposé contre la décision précitée, puis, hors délai, une demande a été adressée afin que l’appel soit converti en recours ; la cour d’appel a déclaré l’appel irrecevable (consid. 3.1).
Le Tribunal fédéral examine notamment si l’erreur commise dans le choix de la voie de droit est imputable au recourant, qui était représenté par un avocat. La question cruciale est de savoir si l’appel du recourant aurait dû être converti en recours au sens de l’art. 319 CPC, à l’aune du principe de la bonne foi (consid. 4.1). A ce titre, seule une négligence grossière d’un·e mandataire professionnel·le peut y faire échec, en cas d’une indication erronée de la voie de droit par l’autorité elle-même (consid. 4.1.1). Lorsque l’erreur est le résultat d’un choix délibéré d’une partie représentée par un avocat, on retient qu’il n’y a pas de formalisme excessif à refuser la conversion de l’acte en raison de l’erreur grossière, sauf si le choix du moyen de droit recevable présente des difficultés et n’est pas facilement reconnaissable (consid. 4.1.2). Le CPC a opté pour une distinction bipartite des voies de droit, à savoir l’appel (voie ordinaire, art. 308 ss CPC) ou le recours (voie extraordinaire, art. 319 ss CPC) ; reste à savoir laquelle de ces voies est la bonne en l’espèce (consid. 4.2.1).
Une convention de divorce homologuée par l’autorité judiciaire peut faire l’objet d’une interprétation qui doit se baser sur le sens voulu par cette autorité, et non sur les règles applicables à l’interprétation des contrats (art. 18 CO). En effet, contrairement aux transactions conclues au terme d’un litige contractuel, l’autorité judiciaire doit examiner la convention de divorce et la ratifier uniquement si elle est équitable (art. 279 CPC). On peut donc interpréter le jugement en se référant à la manière dont le tribunal a compris la volonté des parties. La voie de droit contre une décision rejetant ou déclarant irrecevable la demande d’interprétation est le recours (art. 334 al. 3 cum art. 319 ss CPC). En revanche, si l’autorité judiciaire interprète la convention au sens de l’art. 334 CPC, le recourant doit déposer un appel ou un recours (consid. 4.2.2).
En l’espèce, l’autorité cantonale a méconnu le fait que la voie de droit indiquée par le premier tribunal dans sa décision (l’appel), était correcte. En revanche, le raisonnement juridique qui a conduit ce magistrat à appliquer l’art. 18 CO était erroné. Pour déterminer la voie de droit, il appartenait à l’avocat, qui estimait que l’autorité aurait dû interpréter la convention de divorce selon l’art. 334 al. 1 CPC, de se demander s’il devait interjeter un appel pour dénoncer l’application erronée de l’art. 18 CO ou, au contraire, un recours pour dénoncer la non-application de l’art. 334 al. 1 CPC. En tout état de cause, il ne suffisait pas à l’avocat du recourant de simplement lire la teneur de l’art. 334 al. 1 CPC pour se rendre compte de la voie à suivre. Dans ces conditions, on ne saurait admettre que le choix du moyen de droit ne présentait aucune difficulté et était facilement reconnaissable par un·e mandataire professionnel·le (consid. 4.3). Partant, le recours est admis (consid. 5).