TF 6B_978/2021 (f) du 5 octobre 2022
Couple non marié; protection de l’enfant; entretien; art. 98 let. b et c, 217 et 219 CP
Violation du devoir d’assistance ou d’éducation (art. 219 CP). Pour que l’art. 219 CP soit applicable, il faut d’abord que la personne autrice ait eu envers une personne mineure un devoir d’assistance (i.e. de protection) ou un devoir d’éducation (i.e. d’assurer le développement, sur le plan corporel, spirituel et psychique, de la personne mineure). Cette obligation et, partant, la position de garant·e de la personne autrice, peut être fondée sur la loi, sur une décision de l’autorité ou sur un contrat, voire sur une situation de fait. Sont notamment des personnes garantes les parents naturels ou adoptifs, un tuteur ou une tutrice, un·e maître·sse d’école, un·e responsable d’une institution, et un directeur ou une directrice d’un home ou d’un internat.
Il faut ensuite que la personne autrice ait violé son devoir d’assistance ou d’éducation ou qu’elle ait manqué à ce devoir. Le comportement délictueux peut donc consister en une action ou en une omission. Dans le premier cas, la personne autrice viole positivement son devoir (e.g. en maltraitant la personne mineure ou en l’exploitant par un travail excessif ou épuisant). Dans le second cas, la personne autrice manque passivement à son obligation (e.g. en abandonnant l’enfant, en négligeant de lui donner des soins ou en ne prenant pas, face à un danger, les mesures de sécurité qui s’imposent). Il faut encore, sur le plan objectif, que la violation du devoir d’assistance ou d’éducation ou le manquement à ce devoir ait eu pour effet de mettre en danger le développement physique ou psychique de la personne mineure. L’infraction réprimée par l’art. 219 CP est un délit de mise en danger concrète. Il n’est donc pas nécessaire que le comportement de la personne autrice aboutisse à un résultat (i.e. à une atteinte à l’intégrité corporelle ou psychique de la personne mineure). La simple possibilité abstraite d’une atteinte ne suffit cependant pas. Il faut que cette atteinte apparaisse à tout le moins vraisemblable dans le cas concret (consid. 5.2).
Point de départ de la prescription (art. 98 let. b et c CP). Rappels : unité juridique ou naturelle d’actions (art. 98 let. b CP) (consid. 5.3.1). Rappels : infraction continue (art. 98 let. c CP). Est notamment une infraction continue la violation d’une obligation d’entretien (art. 217 CP) lorsque la personne autrice omet fautivement et sans interruption pendant un certain temps de fournir, fût-ce partiellement, les contributions dues. La prescription ne commence alors à courir que depuis la dernière omission coupable, i.e. e.g. au moment où elle reprend ses paiements ou se trouve sans faute, par manque de moyens, dans l’impossibilité de s’acquitter de son obligation (consid. 5.3.2).
Dans le cas de la violation du devoir d’assistance et d’éducation, le comportement prohibé doit avoir pour effet de mettre en danger le développement physique ou psychique de la personne mineure (lequel est le bien juridique protégé spécifiquement par l’art. 219 CP), mais ce résultat ne constitue pas une perpétuation d’un état de fait continu contraire au droit qui prendrait fin avec la cessation des agissements coupables (consid. 5.5.2).
En l’espèce, le comportement consistant à avoir contraint sur l’ensemble de la période renvoyée la personne mineure à mentir sur son identité ne peut pas être appréhendé sous l’angle d’une unité naturelle d’actions, avec cette conséquence que la prescription ne courrait que dès le jour du dernier acte (art. 98 let. b CP), ni sous l’angle d’une infraction continue, avec cette conséquence que la prescription ne courrait que dès le jour où les agissements coupables ont cessé (art. 98 let. c CP) (consid. 5.5.3).