TF 5A_413/2022 (f) du 9 janvier 2023
Mariage; étranger; DIP; procédure; art. 105 ch. 1 et 4 CC; 25 ss et 65 al. 1 LDIP
Annulation du mariage – mariage antérieur non dissous (art. 105 ch. 1 CC). Comme l’art. 96 CC (voir ég. art. 64 al. 1 let. b OEC), l’art. 105 ch. 1 CC consacre le principe de la monogamie et celui de l’interdiction de la bigamie et de la polygamie, considérées comme des attitudes contraires à l’ordre public suisse et érigées en cause absolue d’annulation pour violation d’une règle édictée dans l’intérêt public. Si le mariage antérieur a été dissous avant la conclusion du mariage considéré, ce dernier ne peut être annulé sur cette base. L’art. 105 ch. 1 i.f. CC mentionne (sic) (recte : mentionnait dans sa teneur antérieure à l’entrée en vigueur de la loi sur le « mariage pour tous » au 1er juillet 2022) le divorce et le décès du/de la (précédent·e) conjoint·e (par quoi il faut entendre l’autre conjoint·e de l’époux ou de l’épouse bigame) à titre de causes de dissolution du mariage antérieur. L’action est intentée d’office par l’autorité cantonale compétente du domicile des conjoint·es (art. 106 al. 1 CC). Elle peut l’être également par toute personne intéressée, not. le/la conjoint·e de la personne mariée bigame, que celui/celle-là soit de bonne foi ou non. L’intérêt à faire annuler le mariage peut être matériel ou de nature idéale, actuel ou virtuel. Pour des motifs d’intérêt public, l’annulation doit être prononcée même si les conjoint·es souhaitent poursuivre leur mariage. La charge de la preuve de l’existence d’un mariage antérieur et non dissous appartient à la partie qui intente l’action en annulation du mariage subséquent. Si elle y parvient, le partie défenderesse reste en droit d’apporter la preuve du contraire, notamment de la dissolution antérieure, peu en importe les circonstances (par divorce, décès du/de la précédent·e conjoint·e, déclaration d’absence ou l’annulation de la précédente union) (consid. 4.1.1).
Reconnaissance d’un divorce étranger (art. 65 al. 1 cum art. 25 ss LDIP). Cuba n’est pas partie à la Convention de La Haye du 1er juin 1970 sur la reconnaissance des divorces et des séparations de corps. Partant, la reconnaissance en Suisse du divorce prononcé, in casu, à Cuba entre l’intimé et sa précédente épouse est régie par la LDIP. Rappel des règles en la matière (art. 65 al. 1 cum 25 ss LDIP), not. de la réserve de l’ordre public en part. s’agissant de la garantie d’une citation régulière (art. 27 al. 2 let. a et 29 al. 1 let. c LDIP). La reconnaissance d’un jugement étranger n’est pas soumise à une procédure particulière. Toute autorité suisse est apte à statuer à ce sujet à titre préjudiciel, ainsi lorsque l’exception de chose jugée est invoquée ou qu’est alléguée l’existence d’une décision étrangère formatrice (art. 29 al. 3 LDIP). L’art. 29 al. 2 LDIP impose de permettre à la partie qui s’oppose à la reconnaissance d’être entendue et de faire valoir ses moyens (consid. 4.2.1 et 4.2.2). Les principes de la bonne foi en procédure et de l’interdiction de l’abus de droit (art. 2 al. 2 CC et art. 52 CPC) s’appliquent en matière de reconnaissance et d’exécution des jugements et sentences arbitrables étrangers. Rappel des règles qui en découlent (consid. 4.2.3).
Annulation du mariage – mariage visant à éluder les règles sur l’admission et le séjour des personnes étrangères (art. 105 ch. 4 CC). L’art. 105 ch. 4 CC, entré en vigueur le 1er janvier 2008, s’applique en tous les cas aux mariages célébrés après cette date. L’action en annulation des mariages de complaisance ou fictifs est intentée d’office par l’autorité cantonale compétente du domicile des conjoint·es (art. 106 al. 1, 1ère phr., CC). Elle peut aussi être intentée par toute personne intéressée, not. par chacun·e des conjoint·es, en tout temps (art. 106 al. 1, 2e phr., et al. 3 CC). Rappel de la jurisprudence rendue sous l’empire de l’ancien droit des personnes étrangères, à laquelle on peut se référer pour l’application de l’art. 105 ch. 4 CC, et ainsi des principes et critères à appliquer. Le fardeau de la preuve de l’existence d’une cause d’annulation du mariage incombe à la partie demanderesse. La preuve doit porter tant sur l’intention, soit l’absence de volonté commune, même passagère, de créer une véritable communauté conjugale, que sur le résultat, soit l’abus manifeste et effectif des prescriptions de la législation sur les personnes étrangères. Les constatations portant sur les indices relèvent des constatations de fait qui lient en principe le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF). En revanche, le Tribunal fédéral examine librement si les constatations de fait (indices) permettent de conclure à l’existence d’un mariage fictif (consid. 5.1).