TF 5A_236/2023 (d) du 19 septembre 2023
Divorce; entretien; liquidation du régime matrimonial; procédure; art. 107 al. 2 LTF; 59 al. 2 let. a CPC; 125, 205 al. 2 et 651 al. 2 CC; 175 et 176 CO
Procédure – recevabilité de conclusions. Rappel de principes relatifs à l’intérêt digne de protection en tant que condition de recevabilité au sens de l’art. 59 al. 2 let. a CPC (consid. 3.3).
Rappel du principe selon lequel il convient de chiffrer les conclusions sur la liquidation du régime matrimonial dans le cadre du recours auprès du Tribunal fédéral (art. 107 al. 2 LTF). Rappel des principes sur l’exigence d’une formulation claire et précise des conclusions et de la possibilité d’exceptionnellement entrer en matière sur des conclusions formellement insuffisantes si la motivation indique sans équivoque ce que la partie recourante demande au fond, comme par exemple la somme d’argent qui doit être allouée. Une demande non chiffrée ne peut être jugée recevable que si, en cas d’admission du recours, le Tribunal fédéral ne pourrait de toute façon pas statuer lui-même sur le fond et devrait renvoyer l’affaire à l’instance inférieure ; il en va de même pour les demandes en renvoi (consid. 4.3.1).
En l’occurrence, la recourante contestait dans ses conclusions principales uniquement les chiffres du dispositif du jugement attaqué, relatifs à la vente aux enchères du logement familial, afin qu’il lui soit attribué, sans pour autant demander la réforme du chiffre relatif à la soulte de liquidation du régime matrimonial qui était impactée par l’octroi ou non du logement conjugal à l’une des parties. Comme le chiffre du dispositif relatif à la soulte est entré en force faute d’avoir été contesté, le recours était incomplet et ne contenait pas de proposition chiffrée découlant de l’attribution exclusive du logement qu’elle revendiquait, raison pour laquelle le Tribunal fédéral l’a jugé irrecevable (consid. 4.3.2).
Liquidation du régime matrimonial – attribution d’un bien-fonds en copropriété. Rappel des principes. Si les conditions de l’art. 205 al. 2 CC ne sont pas remplies, c’est l’art. 651 al. 2 CC qui s’applique et duquel peut découler la vente aux enchères du bien. L’attribution du bien à une des parties ne doit en principe pas placer l’autre partie dans une situation moins favorable que le partage physique de la chose ou sa vente aux enchères. Le droit à l’attribution ne peut donc être accordé que contre une indemnisation complète de l’autre conjoint∙e sur la base de la valeur vénale du bien, sous réserve des règles spéciales en matière d’immeubles agricoles. Dans le cadre de la pesée des intérêts, il faut également prendre en compte un intérêt purement financier. Si la personne mariée qui souhaite reprendre le bien ne peut pas payer l’indemnité, la pesée des intérêts doit être en faveur de l’autre qui demande la vente aux enchères publiques. L’intérêt financier de la vente aux enchères publiques ne réside pas dans un produit en espèces, mais dans la libération de la responsabilité solidaire pour les dettes hypothécaires grevant l’immeuble (consid. 3.3).
Rappel du principe selon lequel la reprise de la dette hypothécaire par l’une des parties ne décharge l’autre qu’en cas de consentement du créancier ou de la créancière hypothécaire (art. 175 et 176 CO) (consid. 3.4).
Entretien entre conjoint·es après divorce (art. 125 CC). Rappel des principes relatifs à la fixation d’une contribution d’entretien après divorce (art. 125 CC). Le résultat de la liquidation du régime matrimonial doit également être intégré à la fortune dont il faut tenir compte dans l’appréciation du droit à l’entretien après divorce (consid. 5.3.1). Rappel de la jurisprudence selon laquelle l’entretien dû en vertu de l’art. 125 al. 1 CC comprend également le montant nécessaire à la constitution d’une prévoyance vieillesse appropriée ; il s’agit de compenser d’éventuelles pertes futures après le mariage, lorsqu’une personne, après le divorce d’un mariage qui a marqué sa vie, ne peut pas exercer d’activité lucrative ou ne peut exercer temporairement qu’une activité lucrative limitée et ne peut donc pas cotiser, ou pas entièrement, à sa propre prévoyance vieillesse (consid. 5.3.2).