TF 5A_23/2023 (f) du 17 janvier 2024
Couple non marié; étranger; autorité parentale; garde des enfants; droit de visite; procédure; art. 301a al. 1 et al. 2 let. a CC; 311 al. 1 CPC
Déménagement à l’étranger de l’enfant (art. 301a al. 2 let. a CC) – rappel de principes. En cas de désaccord sur le déménagement de l’enfant, que l’autorité doit trancher, le modèle de prise en charge préexistant constitue le point de départ de l’analyse, qui doit se baser sur le bien de l’enfant, les intérêts des parents devant être relégués au second plan (consid. 3.1.1 et 3.1.2).
En cas de garde exclusive, l’intérêt de l’enfant est en principe de déménager avec son parent de référence, qui le prend en charge de manière prépondérante. A moins que ce changement ne mette en danger le bien de l’enfant, les difficultés usuelles liées à un nouveau lieu de vie n’en faisant en principe pas partie. Même lorsque les conditions permettant le départ à l’étranger sont remplies, il faut encore tenir compte des circonstances concrètes et notamment de l’âge de l’enfant et de ses souhaits, étant précisé que plus l’enfant grandit moins il/elle est attaché·e au parent de référence, son environnement, ses activités et son cercle social gagnant de l’importance (consid. 3.1.2).
Idem – attribution de la garde. Lorsque le modèle de prise en charge était à parts plus ou moins égales avant les projets de déménagement litigieux, l’autorité judiciaire doit attribuer la garde de l’enfant à l’un des parents (consid. 3.1.2). Rappel des critères pertinents pour l’attribution de la garde (consid. 3.1.3).
Rappel de la jurisprudence selon laquelle la prise en charge en nature d’enfants scolarisé·es peut être déterminée en divisant la journée en trois périodes (matin/rentrée-sortie de l’école/soir) et en calculant sur 14 jours le nombre d’unités dont chaque parent est responsable (consid. 3.2.2). Le Tribunal fédéral précise que cette façon de procéder a été utilisée dans des cas où il s’agissait de déterminer la manière dont les coûts des enfants devaient être répartis entre les parents. En l’espèce, s’agissant d’un cas d’application de l’art. 301a al. 1 CC, le Tribunal fédéral estime qu’il importe peu de savoir précisément à quel moment de la journée et de la semaine chaque parent s’occupait de l’enfant. Il s’agit plutôt de déterminer si l’un d’entre eux s’en occupait de manière réellement plus significative que l’autre, de sorte qu’il constituait une figure parentale de référence pour l’enfant dont il aurait été manifestement contraire à ses intérêts de le séparer (consid. 3.2.2).
En l’occurrence, la mère ne parvient pas à démontrer l’arbitraire de l’instance inférieure, qui a estimé que le modèle de prise en charge était à parts plus ou moins égales, en invoquant le fait qu’elle avait tissé de meilleurs liens avec l’enfant en raison de la qualité des moments passés ensemble du fait qu’elle travaillait peu, voire pas, et s’occupait donc elle-même de l’enfant en journée, alors que le père ne s’en occupait que le soir et la nuit et avait parfois été aidé par la grand-mère (consid. 3.2.2).
Selon le Tribunal fédéral, quand bien même la mère ayant déménagé à l’étranger pourrait garantir une situation stable à l’enfant, il n’en demeure pas moins que le fait de sortir l’enfant de 4-5 ans du cadre de vie auquel il est habitué et de le séparer des personnes qu’il fréquente au quotidien est de nature à créer une instabilité qui ne peut se justifier que si elle est dans son intérêt en application des autres critères (consid. 3.2.3).
En l’occurrence, dans la mesure où l’enfant n’a jamais vécu avec son demi-frère, le critère de la fratrie revêt moins d’importance (consid. 3.2.3).
Maximes inquisitoire et d’office et devoir de motivation – rappel de principes. Les maximes inquisitoire et d’office applicables en instance cantonale ne dispensent pas la partie recourante de motiver son appel (art. 311 al. 1 CPC). En l’espèce, le fait que la recourante ait mentionné avoir contesté son droit de visite dans d’autres actes de procédure ou pris des conclusions tendant à l’instauration d’un droit de visite plus large ne permet pas de considérer qu’elle a valablement motivé son appel sur ce point (consid. 4.3).