TF 5A_127/2023 (f) du 24 avril 2024
Modification de jugement de divorce; entretien; art. 129 CC
Modification des contributions d’entretien post-divorce (art. 129 CC) – conditions à l’entrée en matière. Rappel de principes. Seul est déterminant le fait que la contribution d’entretien ait été fixée sans tenir compte des nouvelles circonstances, qu’elles aient été prévisibles ou non. Elles doivent s’être produites au jour du dépôt de la demande de modification et non au cours de la procédure (consid. 3.1 et 4.3). Lorsque la prémisse du changement significatif et durable, soit probablement de durée illimitée, est donnée, l’autorité judiciaire doit à nouveau calculer la contribution d’entretien selon tous les éléments actualisés (consid. 3.1).
Idem – concubinage qualifié. Rappel de principes et notamment de la définition du concubinage qualifié et du fardeau de la preuve. Son existence ne dépend pas des moyens financiers des concubin·es, mais de leurs sentiments mutuels et de l’existence d’une communauté de destins. Il s’agit de déterminer le soutien que les concubin·es sont prêt·es à assumer l’un·e pour l’autre (consid. 3.2). Le concubinage qualifié est présumé lorsqu’il dure déjà depuis 5 ans au moment de l’ouverture de l’action, étant précisé qu’à l’inverse, en procédure de divorce, le délai de 5 ans s’apprécie au jour où l’autorité judiciaire statue, cas échéant en deuxième instance (consid. 3.2 et 4.3). En s’engageant volontairement dans une nouvelle communauté de destins, la partie crédirentière renonce – plus ou moins définitivement – à ses prétentions pécuniaires envers son ex-conjoint·e, indépendamment de sa nouvelle situation économique. La question de savoir s’il convient de suspendre ou de supprimer la contribution d’entretien dans de telles circonstances doit être tranchée par une pesée des intérêts entre les ex-conjoint·es. Elle est en principe supprimée lorsque le concubinage a duré plus de 5 ans ou lorsqu’en raison d’autres facteurs la stabilité de la communauté de vie est suffisante (consid. 3.2). Le fait de partir ensemble en vacances, après en avoir projeté à deux le lieu et le déroulement, tout comme le fait de ne pas avoir de difficultés au sein du couple, ne sont pas propres à démontrer une volonté des concubin·es de prendre l’un·e envers l’autre des responsabilités telles qu’elles pourraient découler du mariage (consid. 4.3).
En l’occurrence, à mesure où l’ex-épouse et son concubin sont totalement indépendant·es l’un·e de l’autre financièrement et que les coûts du ménage sont répartis par moitié, et ce, nonobstant les capacités financières inférieures de l’ex-épouse, le Tribunal fédéral est arrivé à la conclusion que l’assistance économique, telle qu’elle existe dans le mariage, fait défaut et n’est pas due à un manque de moyens, mais résulte d’un choix. Pour que le concubinage qualifié soit admis, il aurait donc fallu faire état d’autres circonstances déterminantes, comme des engagements financiers à long terme (consid. 4.3).
Idem – interprétation de la convention d’entretien. Rappel de principes (consid. 3.3).