TF 5A_474/2023 (d) du 22 mai 2024
Divorce; garde des enfants; procédure; art. 133 al. 1 ch. 2 CC; 296 al. 1 CPC
Attribution de la garde de l’enfant en cas de divorce (art. 133 al. 1 ch. 2 CC). Rappel de principes (consid. 3.1.1-3.1.2). En règle générale, les frères et sœurs ne sont pas séparé·es ; il peut toutefois être dérogé à ce principe en raison des divergences de besoins (différence d’âge et liens affectifs) et désirs entre les frères et sœurs (consid. 3.1.2).
L’existence d’une maladie psychique ne s’oppose pas en soi à l’attribution de la garde au parent concerné. La garde peut être attribuée si tant est que le trouble psychique n’a pas d’influence sur les capacités éducatives ou qu’une thérapie conséquente permet de (re)créer dans une mesure suffisante les capacités éducatives, ce qui présuppose en principe une prise de conscience de la maladie et du traitement (consid. 3.4.1).
Si un parent a été condamné pour des voies de fait à l’endroit de l’enfant et que l’autorité judiciaire n’en tient pas compte, celle-ci doit impérativement justifier, dans le cadre de l’appréciation de la question de la garde, pourquoi un comportement pénalement répréhensible à l’égard de l’enfant ne serait pas pertinent pour l’attribution (consid. 3.6.2).
Maxime inquisitoire illimitée (art. 296 al. 1 CPC) – devoir d’instruction de l’autorité. In casu, à la lumière de la violence massive et attestée de la mère à l’endroit du père ainsi que de son diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement instable, de type impulsif, ressortant de l’expertise en procédure pénale, les autorités cantonales n’auraient pas dû se contenter des constatations du réseau entourant la mère pour estimer que ses capacités éducatives n’étaient pas entamées par son trouble. En effet, en constatant que l’expertise de la procédure pénale soulignait des problèmes de la mère dans la gestion des impulsions, de l’émotivité et de l’agressivité, mais ne s’attardait pas sur ses capacités éducatives, les instances inférieures auraient dû, en vertu de la maxime inquisitoire illimitée, ordonner une nouvelle expertise permettant de clarifier cette information, car de tels déficits peuvent avoir une influence sur la capacité éducative. Au vu du type de trouble, ce n’est pas la fréquence des rencontres avec la mère qui est décisive pour l’évaluation, mais ce sont les connaissances spécifiques des expert·es, qui doivent connaître les maladies psychiques et le diagnostic en question. Même s’il ressort du dossier que les enfants se développent bien, le danger latent doit en l’occurrence être exclu (consid. 3.4.3).
Idem – production des dossiers APEA des demi-frères et demi-sœurs. En l’occurrence, comme la mère ne détenait pas la garde de ses deux enfants aînés et que les autorités de protection de l’enfant ont dû être impliquées pour tous ses enfants, la seconde instance cantonale aurait dû accepter la réquisition du père tendant à la consultation des dossiers APEA des autres enfants de la mère (consid. 3.5.2).