TF 5A_414/2024 (d) du 29 janvier 2025
Couple non marié; filiation; art. 260a, 260c et 306 al. 3 CC
Reconnaissance de paternité – contestation. Rappel des principes. Une reconnaissance formellement valable établit potentiellement un lien de filiation avec un homme qui n’est pas le père génétique de l’enfant. Un tel lien de filiation peut être supprimé par une action en contestation qui peut être intentée par toute personne intéressée, en particulier par la mère, par l’enfant et, s’il ou elle est décédé·e, par ses descendant·es, ainsi que par la commune d’origine ou la commune de domicile de l’auteur de la reconnaissance (art. 260a CC) (consid. 2.1).
Idem – délai. Rappel des délais pour agir en contestation (art. 260c CC). Les délais de l’article 260c al. 1 CC sont des délais de péremption qui ne peuvent être ni interrompus ni suspendus et dont le non-respect entraîne en principe l’extinction du droit d’action. L’action peut être intentée après l’expiration du délai lorsque de justes motifs rendent le retard excusable (art. 260c al. 3 CC) (consid. 2.2).
L’art. 260c al. 3 CC n’accorde pas de délai supplémentaire, même de courte durée ; il incombe à la personne qui conteste la reconnaissance d’intenter l’action le plus rapidement possible, dès que le motif du retard a disparu. La jurisprudence admet en principe un délai d’un mois, à moins que des circonstances exceptionnelles n’aient empêché la personne d’agir rapidement (consid. 2.6).
Selon la jurisprudence et la doctrine, les justes motifs sont notamment la maladie, l’absence et l’incapacité de discernement, l’espoir de la mère de l’enfant de maintenir la relation de couple, et l’absence de motif suffisant pour douter de la paternité (consid. 2.6).
Idem – qualité pour défendre. L’action est intentée contre l’auteur de la reconnaissance et contre l’enfant lorsque l’un et l’autre ne l’intentent pas eux-mêmes (art. 260a al. 3 CC) ; ils ou elles forment ainsi une consorité passive nécessaire. Etant donné qu’il existe en principe un conflit d’intérêts entre la mère et l’enfant dans le cadre d’une action en contestation, celle-ci, en tant que représentante légale de l’enfant, ne peut valablement mandater un·e représentant·e pour représenter l’enfant dans le cadre de la procédure (art. 306 al. 2 et 3 CC). Le pouvoir de représentation de la mère est supprimé de ce fait (art. 306 al. 3 CC) (consid. 2.2).
Idem – intérêt de l’enfant. Le Tribunal fédéral admet qu’il n’existe pas de principe selon lequel la concordance entre la paternité légale et la paternité biologique est généralement dans l’intérêt de l’enfant (consid. 2.8). La filiation génétique n’est pas la seule justification d’un lien de filiation. Il convient de faire la distinction entre les actions en reconnaissance de paternité et le droit de connaître ses origines génétiques. Comme il existe non seulement une parentalité génétique, mais également une parentalité socio-psychologique, il est justifié de maintenir un lien de filiation même s’il est établi que le père juridique n’est pas le père génétique (consid. 2.9).